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8 avril 2011 5 08 /04 /avril /2011 09:54

Leur avenir, c'est ce à quoi on doit penser dès qu'ils arrivent dans le groupe.

 

Tout notre accompagnement doit viser des objectifs précis : toutes les activités que font les élèves, que ce soit à l'atelier ou en classe, doivent leur servir pour leur avenir.

 

C'est incontournable.

 

Nos élèves ont beaucoup de difficultés à progresser et quand ils le font, il ne faut pas que ce soit vain : il faut qu'ils voient que le mal qu'ils se donnent leur est bénéfique, qu'ils en tirent quelque chose et que cela leur servira tout le reste de leur vie.

 

Le livret de compétences imagé (dont j'ai parlé ici) est un outil intéressant pour qu'ils se rendent compte de leur évolution. Sans repères visuels, nos élèves ont tendance à penser qu'ils ont toujours su faire ce qu'ils savent faire...

 

 

Mais le plus important est de les préparer à leur sortie de l'établissement à partir de 18 ou 19 ans...

 

En effet, dans la section TED de mon établissement, il n'y a pas d'amendement Creton, ce qui veut dire qu'à 20 ans, leurs parents doivent leur trouver autre chose... ils seront rayés de nos listes...

 

Je sais que ces mots peuvent être assez cruels : "leurs parents doivent..." leurs parents doivent toujours tellement de choses !!!

Mais c'est malheureusement la réalité.

Nous pouvons les aiguiller et leur donner notre avis, nous les informons sur les structures pour adultes que nous connaissons dans notre coin...

Mais c'est tout ce que nous pouvons faire et pire : tout cela n'est pas considéré comme une de nos missions...

 

Les parents se sentent vraiment seuls face à ce problème énorme : manque de place dans les structures, mais surtout manque de structures adaptées !!!

 

 

Voilà concrètement ce qu'est l'avenir des jeunes qui sont sortis de la section depuis 4 ans que j'y travaille :

 

  • V. est sorti de la section dès la fin de ma première année sur ce poste : il avait 20 ans.

Il n'y avait de place pour lui nulle part... la section venait juste d'ouvrir, et nous n'avons pas eu le temps de prévenir ses parents qu'il fallait chercher et l'inscrire sur des listes d'attente dès ses 18 ans...

Il s'est donc retrouvé chez lui du jour au lendemain... pendant un an...

Puis il a pu avoir une place à mi-temps dans un foyer occupationnel : il y allait donc 2 jours par semaine depuis...

 

 

  • L'année suivante, c'était au tour de H., 20 ans lui aussi.

H. est hyper actif : il a toujours besoin de s'occuper... quand il est sorti de l'établissement, sa maman était fort malade...

Comme V. il a pu être accepté à mi-temps dans le même foyer occupationnel... mais l'équipe de ce foyer a beaucoup de mal avec lui : ce n'est pas un foyer pour adultes autistes, mais pour personnes déficientes.

Le personnel n'est donc pas formé à l'autisme...

Au niveau matériel : très peu d'aides visuelles ou de structuration...

Et des équipes qui tournent sans arrêt sans réel référent pour chaque personne... 

L'adaptation est particulièrement compliquée pour les jeunes qui sortent de notre petit cocon (même si nous faisons de notre mieux pour les préparer à la sortie...)

 

 

  • Cette année, 4 élèves de notre groupe ont 20 ans ! Il s'agit de F., G., L. et N.

Nous avons justement la chance inouie que des "maisons d'autonomie" ouvrent au mois de juin !

Cette ouverture veut dire "places libres"... ces mots comme cela au pluriel, c'est vraiment quelque chose dont on doit profiter, car ça ne se reproduira pas de si tôt !!

A l'initiative de l'association opale autisme 62, un foyer occupationnel pour adultes autistes a construit une nouvelle aile qui permettra d'accueillir 12 adultes atteints d'autisme.

Pour être accepté dans ce nouveau bâtiment, il faut avoir un minimum d'autonomie, ce qui n'est pas le cas de G. et L.

En collaboration avec les parents de F. et N., nous avons donc rempli des dossiers pour répondre aux attentes de ce nouvel établissement.

 

Les parents, de leur côté, ont dû s'adresser à la MDPH (Maison Départementale du Handicap) afin d'orienter leurs enfants là bas et d'obtenir leur notification.

N. et F. n'ont pas encore 20 ans (en mai pour N. et en décembre pour F.), mais ils sont déjà notifiés par la MDPH : ils sont acceptés tous les 2 dans ces maisons d'autonomie !

C'est une chance, c'est sûr, mais cela ne va pas être facile : ces maisons ont, bien entendu, un régime "internat"...

Cela va faire un changement énorme pour nos 2 élèves qui jusqu'ici rentraient chez eux tous les soirs...

Nous essayons vraiment de les préparer à ce cataclysme qui va leur tomber dessus d'ici quelques mois... mais pour eux qui ont une résistance importante au moindre petit changement... cela risque d'être vraiment compliqué !!!

 

Nos 2 anciens élèves V. et H. ont aussi obtenu une place dans ces maisons d'autonomie : ce qui devrait permettre à L. et G. d'obtenir la leur au foyer occupationnel que les premiers quittent.

 

Bien sûr, on aurait pu espérer que L. et G. bénéficieraient d'une place dans uns structure adaptée à leur autisme...

Ce n'est pas parce qu'ils sont adultes qu'ils ne peuvent plus évoluer... et j'aurais aimé qu'ils puissent continuer d'être stimulés comme nous le faisons...

Mais leurs progrès depuis quelques années sont vraiment faibles..

Il faut bien avouer qu'ils stagnent et que tout ce que nous faisons ne leur permet que de conserver leurs acquis...

J'espère juste qu'ils seront heureux dans ce nouvel environnement, et surtout qu'ils ne régresseront pas trop...

 

Je passerai bien sûr les voir quelques semaines après leur admission (que ce soit au foyer occupationnel ou aux maisons d'autonomie)... Je vous dirai ce qu'il en est !

 

 

 

J'espère que cet article vous montrera à quel point il faut s'y prendre tôt pour orienter ces jeunes, car les places sont chères !

Et puis les parents ne peuvent bien souvent compter que sur eux-mêmes...

 

Alors bon courage à eux... et surtout aux jeunes qui doivent passer le grand cap !

 

 

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4 avril 2011 1 04 /04 /avril /2011 08:36

Ce n'est pas une blague !

 

Bruno Gepner est venu "conférencer" à Lens vendredi. Il nous a parlé de sa théorie.

 

Pour faire court, son hypothèse est que tout va trop vite dans ce monde pour les personnes atteintes d'autisme.

Il pense qu'en ralentissant tout (gestes et langage), on se fait beaucoup mieux comprendre d'elles.

Il a donc conçu, avec son équipe de la région PACA, un logiciel qui ralentit tout de 2 à 2,5 fois.

Tout n'est pas encore finalisé, mais ils ont l'intention d'observer un groupe d'enfants avec autisme pour qui toutes les activités* de la journée seront ainsi "ralenties". Ils compareront alors les résultats obtenus avec un autre groupe d'enfants autistes qui auront fait les mêmes activités, mais à vitesse normale.

 

Leur objectif est de montrer que c'est la rapidité de notre monde qui handicape le plus les personnes avec autisme.

 

 

Nous avons aussi eu la chance de voir l'excellent Eric Willaye du SUSA... Son intervention décalée m'a beaucoup plu !

 

 

 

* = j'ai fait une erreur ici : lire le commentaire de B. Gepner pour rectifier.

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30 mars 2011 3 30 /03 /mars /2011 14:40

Voici un reportage américain absolument bluffant sur une jeune fille autiste nommée Carly :

suivre ici.

 

Je ne comprends absolument rien en anglais, mais j'ai quand même suivi... et cette histoire est incroyable !

Merci à Yolande de m'avoir envoyé ce lien !

 

 

Tous ces reportages qui "prônent" la méthode comportementaliste gênent souvent les défenseurs de Freud...

En même temps tous ces témoignages prouvent que l'éducation est importante et qu'elle fait partie intégrante des soins.

 

Le virage brutal qu'est en train de faire le France dans le domaine de l'autisme ne peut pas être néfaste... même s'il ne faut pas passer d'une extrême à l'autre !

 

Quand j'entends les psychanalistes se plaindre qu'il ne faut pas balayer tout ce qui a été entrepris ces dernières années, je rigole !

Je pense que s'ils n'avaient pas fonctionné avec des oeillères comme ils l'ont fait pendant des années, ils n'en seraient pas là maintenant : ils ne voulaient pas s'ouvrir... et maintenant que le vent tourne, ils demandent à tout le monde d'être ouvert et de ne pas foncer tête baissée vers le 'tout - comportementaliste' !

 

Ils méritent bien tous les reproches qui leur sont faits... mais ce n'est pas pour autant qu'ils n'ont pas un tout petit peu raison...

 

Je pense vraiment que cette guerre est ridicule et qu'il y a du bon à prendre dans toutes les méthodes.

 

Quel gâchis ces petites guéguerres : " - c'est moi qui ai raison", " - non c'est moi"...

 

Travaillons ensemble, parents, médecins, paramédicaux, enseignants, AVS, amis, sympatisants, etc... et écoutons nous les uns les autres plutôt que de parler plus fort que les autres pour se faire entendre !!

 

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28 mars 2011 1 28 /03 /mars /2011 13:33

A l'occasion de la Journée mondiale de sensibilisation à l'autisme (dont j'ai déjà parlé) célébrée de 2 avril prochain (samedi !), M. Ban Ki-Moon, secrétaire général de l'ONU s'est exprimé ainsi :

 

 

"Le nombre d’enfants et d’adultes atteints d’autisme continue d’augmenter sans distinction de nationalité ou d’appartenance raciale, ethnique ou sociale.  Même si les troubles autistiques sont de mieux en mieux compris par la communauté scientifique, le milieu médical et les personnels de soins, ils restent globalement mal connus.  La célébration annuelle de la Journée mondiale de sensibilisation à l’autisme revêt donc une importance grandissante car elle offre la possibilité de mobiliser des forces pour agir et aider.

Les enfants et les adultes atteints d’autisme, qui sont en butte à d’énormes problèmes de stigmatisation et de discrimination, ne sont pas assez aidés.  Beaucoup doivent surmonter de multiples obstacles au quotidien.  Ils sont bien trop nombreux à endurer un isolement, de mauvais traitements et des discriminations terribles qui portent atteinte à leurs droits fondamentaux.

L’autisme est un trouble complexe mais, dans bien des cas, un traitement adapté et précoce permet de constater des améliorations.  C’est pourquoi il importe tellement de faire un travail de sensibilisation aux manifestations de l’autisme et de proposer des services aux personnes atteintes le plus tôt possible.

Il est également crucial de soutenir les parents, de créer pour les personnes autistes des emplois axés sur leurs compétences et leurs points forts, et d’améliorer la prise en charge des jeunes autistes dans le système éducatif public.

Ces mesures qui bénéficient aux autistes, à leur entourage et aux autres ne peuvent que profiter à l’ensemble de la société.  Comme l’a dit une mère d’enfant autiste: « Le chemin que ma fille a parcouru est certes long mais le mien a été plus long encore ».

Suivons ensemble cette voie vers un monde plus humain qui ne laisse personne au bord de la route."

 

 

 

Espérons, comme il l'affirme, que cela offrira "la possibilité de mobiliser des forces pour agir et aider".

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25 mars 2011 5 25 /03 /mars /2011 13:48
Dans le cadre de la journée mondiale de l'autisme du 2 avril, la campagne du collectif autisme : "Scolarisation et éducation des enfants autistes" a débuté hier, 24/03/2011.

Le collectif Autisme est composé de cinq fédérations et associations: Autisme France, Sesame Autisme, Autisme sans frontières, ProAidautisme et AspergerAide. 
La brochure :
 
"Les enfants autistes ont besoin d’apprendre comme les autres
Scolarisation et éducation des enfants autistes"
 
a été tirée à 65000 exemplaires pour les écoles maternelles et primaires.

En voici quelques extraits :
Sans-titre-1.jpg
Sans-titre-2.jpg
Sans-titre-3.jpg
Retrouvez toutes les infos sur le site du Collectif autisme (vous pouvez aussi y télécharger la brochure complète) :
Interview avec Danièle Langlois présidente d'Autisme France. sur LCI  ici
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23 mars 2011 3 23 /03 /mars /2011 21:56

Il m'arrive de reprendre d'anciennes pages et d'y ajouter quelques exercices...

 

Je viens par exemple de poster un nouvel exercice que j'ai construit aujourd'hui pour apprendre la notion de centimes quand les prix ronds sont bien maitrisés.

C'est ici !

 

Je me suis dit qu'en le mettant dans un article, ce serait plus facilement visible (à quoi bon aller relire des pages déjà explorées sinon ?)

 

J'ai aussi rajouté des exercices dans Léo & Léa il y a peu de temps (les syllamots, c'est nouveau !).

C'est là !

 

Je ne sais pas si ça se voit quelque part quand je fais des modifications comme ça, alors je préfère prévenir !

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12 mars 2011 6 12 /03 /mars /2011 14:35

Tout ce que je poste sur ce blog concerne uniquement une partie du travail avec mes élèves.

 

En effet, je ne suis qu'une enseignante. Je ne sais apprendre à mes élèves qu'une toute petite partie de ce qu'ils doivent connaître ! C'est la partie scolaire : ce que l'école doit leur apprendre m'incombe.

Mais les enfants atteints d'autisme doivent TOUT apprendre, et la partie scolaire n'est pas forcément celle qui est primordiale !

 

Même les adultes Asperger qui témoignent insistent sur ce point : tout doit leur être expliqué, alors que les neurotypiques observent et reproduisent... pour eux, tout doit être décrypté, décomposé, enseigné.

 

Mon établissement donne vraiment aux jeunes qui y sont accueillis les moyens de progresser... Par cela, j'entends les moyens humains. Car pour faire progresser un groupe d'enfants atteints d'autisme, il faut être plusieurs. Il faut être une équipe.

Pour chaque groupe de la section TED dans laquelle je travaille, il y a 3 éducateurs à temps plein.

Ce qui donne pour 6 élèves : une enseignante à mi-temps et 3 éducateurs à temps plein, soit à peu près 2 élèves par adulte. C'est un encadrement énorme ! Mais il est indispensable pour que les élèves soient sans arrêt stimulés et progressent comme ils le font.

 

Ce sont les éducateurs qui font le plus gros du travail !

Ils apprennent à mes élèves à s'insérer dans la société, à savoir être autonomes au quotidien.

A l'atelier, ils font de la cuisine, de l'entretien des locaux, ils vont faire les courses, apprennent à s'habiller, se déshabiller, être propres, bien se comporter, ne pas s'automutiler, se moucher, ne pas être violents... etc...

 

Avec moi, ils ne font qu'apprendre à lire et compter (en gros)... Ce n'est vraiment pas grand chose, finalement !

 

Bien sûr, nous travaillons ensemble et c'est vraiment très important de ne pas cloisonner notre travail.

En classe, nous reprenons beaucoup ce qui est fait à l'atelier. Je me sers souvent de ce qu'ils font avec les éducateurs pour les motiver à travailler.

Nous décidons de tout ensemble : le temps scolaire de chacun dépend de ses besoins et de ses possibilités.

Le règlement est le même en classe et à l'atelier.

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21 février 2011 1 21 /02 /février /2011 10:35

Quand on lit les très nombreuses biographies de personnes atteintes d'autisme, on se rend vite compte que le moment du diagnostic est très important pour chacunes d'entre elles.

 

Evidemment, ces biographies ont toutes été écrites par des personnes capables de le faire... et je sais bien que mes élèves, avec leur déficience associée, ne seront jamais capables d'exprimer autant de choses.

 

Mais cela m'a fait réfléchir...

 

Mes élèves aussi ont le droit de savoir qu'ils sont atteints d'autisme... que ce qui les rend différents est identifié, qu'ils ne sont pas les seuls à avoir ces symptomes... qu'ils peuvent réussir à vivre très heureux avec ce diagnostic et que ce n'est pas une maladie, mais un handicap.

 

On s'appuie très souvent sur les récits des autistes de haut niveau ou sur les remarques des personnes Asperger pour comprendre les autres personnes atteintes d'autisme... ce n'est pas pour rien si on parle de "spectre autistique" : même s'ils sont très différents de mes élèves, c'est en lisant tous ces témoignages que petit à petit on peut essayer de comprendre la façon de penser des personnes autistes... on peut essayer de voir les choses comme les personnes autistes les voient.

 

Dans ma classe, tous mes élèves sont différents... Certains n'ont pas les moyens de comprendre ce qu'est l'autisme... C'est quelque chose de très abstrait, c'est déjà difficile à comprendre pour les chercheurs, alors pour mes élèves les plus en difficulté, cela me parait vraiment être impossible...

 

Mais je suis persuadée que certains ressentiront un réel soulagement à comprendre ce mot "AUTISME" qu'ils doivent avoir entendu souvent sans le comprendre. Même s'ils n'en ressentent pas vraiment le besoin et ne nous demandent jamais textuellement : "C'est quoi l'autisme ?"

 

La première chose à faire quand on part dans cette direction, c'est de bien réfléchir pour ne pas se tromper : dans cette entreprise, on n'a absolument pas le droit à l'erreur... il ne faut pas déclencher chez les élèves de nouvelles angoisses en abordant ce sujet avec eux !

 

Cela fait trois ans que ce projet trotte dans ma tête... j'en ai parlé avec la psychologue de l'établissement, avec de nombreux professeurs lors de mon capa-sh... et puis j'ai rencontré Stéfany Bonnot au MIN autisme à l'INS-HEA, grâce à Christine Philip. Stéf (comme elle veut qu'on l'appelle) est diagnostiquée Asperger ; son métier est d'aider les AVS qui s'occupent d'enfants autistes, elle est donc très calée pour répondre à ce genre de questions...

 

Aucun de ces professionnels n'a eu de réponse catégorique à mes questions : "Y a-t-il un risque à aborder l'autisme avec mes élèves ?", "Est-ce qu'ils peuvent être plus angoissés avec ces connaissances ou alors ces séances ne peuvent-elles être que positives ?"

 

Parce que là est l'important : s'il y a le moindre risque pour qu'un seul de mes élèves soit gêné par mes propos sur l'autisme, alors mieux vaut appliquer le principe de précaution et ne rien faire. Mieux vaut ne pas aborder un sujet si je n'y ai pas parfaitement réfléchi avant et que je ne maîtrise pas les conséquences que cela peut avoir sur les élèves.

 

Personne ne m'a vraiment dit : "Tu peux y aller, il n'y a aucun risque."

 

Et je le conçois. Comme pour chaque séance avec des élèves atteints d'autisme, il faut adapter à chacun ce qu'on compte dire et même si on doit en parler ou non.

 

Alors je me suis tournée vers les personnes qui connaissent le mieux mes élèves : leurs parents. Ils sont les seuls qui savent exactement ce que ces séances pourront déclencher chez leurs enfants, ils sont les seuls à savoir comment réagissent leurs enfants quand on parle d'autisme devant eux...

 

Donc après avoir déterminé avec quels élèves j'avais l'intention de travailler, j'ai demandé à leurs parents ce qu'ils en pensaient... Et leurs réactions ont toutes été positives ! Une seule famille m'a dit : "Il ne comprendra pas.", les autres ont trouvé que c'était une très bonne chose de savoir tout cela avant de quitter l'établissement (en effet, ces élèves vont avoir 20 ans et seront considérés comme des adultes dès l'an prochain).

 

Le plus difficile restait à faire : trouver des images afin de me faire comprendre de ces 3 élèves... et trouver comment faire, de quoi partir, dans quel ordre...

 

 

J'ai posté les outils que j'ai fabriqués ainsi que la façon dont j'ai procédé sur cette page :  Leur dire qu'ils sont autistes et ce que ça veut dire.

Mais encore une fois, c'est une façon de faire, c'est celle que j'ai choisie pour cette classe, mais ce n'est absolument pas un exemple à suivre forcément ! Je ferais certainement différemment avec d'autres élèves !

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26 janvier 2011 3 26 /01 /janvier /2011 18:56

L'autisme et les émotions :

On entend souvent que les personnes atteintes d'autisme ne ressentent rien ou qu'elles ne comprennent rien ni aux émotions, ni aux sentiments... mais c'est totalement faux ! (voir Josef Schovanec décrypte sa façon de ressentir les émotions.)

 

Pourquoi se mettraient-elles en colère alors ?

 

Elles paraissent souvent indifférentes... Elles n'expriment pas leurs émotions de la même façon que nous et elles ne comprennent pas du tout la façon dont nous exprimons les nôtres...

 

Mais les personnes atteintes d'autisme pullulent d'émotions ! C'est même souvent ces émotions qu'elles ne savent ni gérer ni exprimer qui les rendent si fragiles.

 

Mes élèves sont de véritables éponges à émotion : si je suis contrariée, ils seront nerveux... Si quelque chose me tracasse, ils ne se sentent pas bien... parce que je ne suis pas comme d'habitude, et qu'ils aiment que rien ne change.

 

Quand N. lit, ça me fait toujours des frissons partout parce que je sais quels efforts elle fait pour ça et que c'est notre travail ensemble qui l'a amenée à la lecture... Au début, j'en avais les larmes aux yeux et je le laissais paraître : je la félicitais chaleureusement car j'étais très émue. Et bien elle détestait ça : ça la bloquait complètement et elle était très gênée : elle ressentait mon changement et ça la mettait très mal à l'aise. Maintenant, je reste impassible... mais c'est dur !

 

Un autre exemple : il m'est arrivé plusieurs fois d'être victime de la violence d'un élève.

La première fois que ça a été assez "chaud", j'ai eu tendance à appréhender les séances scolaires avec cet élève, je ne le regardais plus de la même façon (j'ai toujours un regard très positif sur mes élèves, je les trouve géniaux !).

Et bien mon élève a tout à fait ressenti cette appréhension et il ne prenait plus autant plaisir à venir en classe, il progressait beaucoup moins. C'est d'ailleurs en analysant ses résultats que je me suis rendue compte que mon regard sur lui avait changé... Je ne pouvais pourtant pas lui tenir rigueur de sa violence (qui n'était pas vraiment tournée contre moi, mais qui était l'expression d'un grande angoisse).

J'ai alors pris sur moi pour que mes sentiments changent à son égard et que l'appréhension cesse : après tout, je n'ai jamais vraiment eu peur de lui, c'est juste que je guettais une éventuelle crise alors que je peux très bien me forcer à ne pas y penser... Tout est rentré dans l'ordre à partir du moment où je me suis rendue compte que je devais agir avec lui comme avant.

 

 

 

L'incompréhension de la communication non verbale :

 

Le fait de ne pas comprendre ce qu'expriment les autres sans parler est très handicapant, surtout quand il s'agit d'émotions fortes. Une mère qui pleure devant son enfant, c'est déjà parce qu'elle craque... Si son enfant se met alors à rire : cela devient vraiment difficile à vivre... C'est pourtant la réaction la plus fréquente chez un enfant atteint d'autisme.

 

Tout cela pour justifier d'une chose importante : il faut apprendre aux jeunes atteints d'autisme à décoder nos émotions d'une part, mais aussi à savoir exprimer les leurs. On peut penser que ce travail n'est pas à faire par une enseignante... et c'est faux pour deux raisons :

 

  • La première est que quand on travaille dans le milieu spécialisé, il faut s'adapter aux "B.E.P" de ses élèves (les besoins éducatifs particuliers). Or les élèves atteints d'autisme ont énormément de lacunes dans le domaine des interactions sociales et ces lacunes les empêchent souvent d'entrer dans les apprentissages. Si on veut qu'ils progressent sur le plan scolaire, il faut alors commencer par travailler ce domaine afin d'ouvrir les portes vers les compétences habituelles des programmes.

 

  • Le seconde raison pour laquelle l'apprentissage des émotions doit faire partie de l'enseignement scolaire, c'est tout simplement parce que cela fait partie des compétences à acquérir au cycle 1 (Dans les programmes de juin 08, dans « DEVENIR ÉLÈVE », on trouve : « À la fin de l’école maternelle l’enfant est capable de : contrôler ses émotions. »)

 

 

 

Les deux facettes du travail sur les émotions :

1- savoir les décoder

2- savoir les exprimer.

 

Je me suis tout d'abord rendue compte de l'importance de la première partie du travail, c'est à dire "savoir reconnaître les émotions sur le visage des autres".

 

C'est quelque chose qui saute aux yeux dès les premiers jours où l'on travaille avec des élèves atteints d'autisme : ils peuvent rire quand on les gronde et avoir très peur si on est ému aux larmes. Ce n'est pas parce qu'ils sont heureux qu'on soit en colère, ni parce qu'ils ont peur de notre émotion ! C'est parce qu'ils ne comprennent absolument pas ce que cela veut dire quand on fronce les sourcils ou qu'on a la chair de poule.

 

C'est une des nombreuses choses qu'ils doivent apprendre de façon précise alors que c'est inné chez les autres enfants (même s'ils ne naissent pas avec cette reconnaissance, les enfants NT comprennent toutes ces choses seuls, en observant et analysant leur entourage dès leur naissance).

 

La première fois que j'ai rencontré les parents de mes élèves, la maman de l'un d'entre eux m'a raconté une mésaventure qui a fini de me convaincre de l'intérêt de ce travail :

Elle était en courses avec son fils et un inconnu a fait un malaise cardiaque. Il est tombé sans connaissance et tout le monde autour était atterré : on a appelé les pompiers et la foule exprimait beaucoup d'inquiétude - les visages étaient fermés.

Mon élève, lui, s'est mis à rire de façon incontrôlable : il avait un fou rire.

Sa maman m'a avoué avoir eu un peu honte de lui a cet instant, car tout le monde le regardait en pensant qu'il était odieux de se réjouir du malheur des autres (ce n'était pas le cas, évidemment, on le comprend bien quand on sait qu'il est autiste - mais ça ne se voit pas sur son visage).

Cette anecdote n'en est qu'une parmi de nombreuses autres : il est vraiment très important de travailler cette compétence avec de jeunes autistes.

 

 

 

La seconde partie du travail paraît peut-être moins importante, mais elle est capitale : il s'agit de "savoir expliquer ce qu'on ressent".

Je ne vous parle pas de psychanalyse ! Même si on sait tous que le fait de dire à d'autres ce qui nous tracasse peut nous aider à surmonter nos petits soucis.

 

Les personnes atteintes d'autisme ont beaucoup de mal à communiquer. Certains de mes élèves ont mis des années à apprendre à demander quelque chose ("Est-ce que je peux avoir un crayon ?" par exemple, peut prendre énormément de temps - et je parle de ceux de mes élèves qui sont verbaux).

 

Sachant cela, on peut se dire que le fait de leur apprendre à expliquer ce qu'ils ressentent sera trop difficile et pas assez rentable pour s'engager dans un projet aussi long ! Pour envisager cet apprentissage, il faut vraiment être sûr que ça en vaudra la peine !

 

Il se trouve que ça en vaut la peine. TOUJOURS. Je suis persuadée que cet apprentissage est incontournable.

 

Je ne l'ai pourtant pas réalisé avec tous mes élèves par manque de temps, mais je le regrette infiniment pour ceux avec qui je ne l'ai pas fait.

Savoir dire qu'on a mal au ventre quand on a mal au ventre.

Savoir dire qu'on est en colère parce que le bus n'est pas passé par les mêmes routes que d'habitude.

Savoir expliquer qu'on a peur de se mettre à côté d'Untel à la cantine parce qu'il peut être imprévisible ou qu'il est trop actif.

Savoir dire : "Non, je ne veux pas danser avec toi parce que j'ai envie de danser tout seul." à la boum des anniversaires.

Savoir expliquer qu'un bruit nous gêne même s'il ne s'agit que du souffle d'un rétroprojecteur qu'on est le seul à entendre.

Autant de situations où ce que l'on ressent pourrait nous faire faire une crise terrible si on n'arrivait pas à l'exprimer.

 

 

RDV à la page Des outils pour travailler sur les émotions. pour voir les outils que j'ai construits pour ce projet.

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8 janvier 2011 6 08 /01 /janvier /2011 14:40

On a coutume de dire que les personnes atteintes d'autisme se sentent plus à l'aise face à un écran d'ordinateur que face à une personne...

 

J'espère vraiment que ce n'est plus le cas de mes élèves dans ma classe !

 

La relation humaine me parait très importante et elle reste ma priorité avec eux, même si je sais qu'elle leur demande des efforts (ils paraissent toujours très heureux de travailler en duo face à moi, mais cela les fatigue certainement plus que de travailler face à un écran !)

 

Si cette idée est répandue, c'est qu'elle est sans doute exacte pour les jeunes enfants atteints d'autisme : en effet, il y a ce sacré "besoin d'immuabilité" ! Un ordinateur, c'est immuable : ça réagit toujours de la même façon. Les personnes autistes n'aiment pas les choses imprévisibles... et un ordinateur, il n'y a rien de plus prévisible !

Et puis il est certain que c'est plus facile pour des personnes atteintes d'autisme de travailler face à un écran : cela demande beaucoup moins de concentration, il y a moins de stimuli que face à une personne, même connue (mais qui communique toujours ; même de façon non verbale).

 

Depuis maintenant 2 ans, j'ai un ordinateur récent dans ma classe, ce qui me permet de faire travailler mes élèves avec cet outil.

 

Il existe énormément de logiciels intéressants et très chers pour les aider à progresser dans les apprentissages scolaires. Mais ce n'est pas le sujet de cet article.

 

Je voudrais vous présenter 3 manières d'utiliser l'ordinateur avec de jeunes autistes qui ne nécessitent pour ainsi dire aucun achat et qui ont 2 intérêts :

 

  • d'abord cela leur permet d'adopter l'outil informatique, ce qui est important pour absolument tous les élèves français (cela devrait devenir une priorité dans toutes les écoles, mais ce n'est que mon avis, et en disant cela je pense surtout aux enfants qui n'ont pas la chance d'avoir un ordinateur chez eux)

 

  • et puis cela permet de travailler la généralisation. J'ai déjà évoqué cette particularité de l'autisme dans un autre article : certains enfants autistes ne savent lire que leur méthode de lecture, d'autres ne comptent que dans leur salle de classe... Il est important avec eux d'apprendre les notions dans différents contextes, avec différents outils, différentes personnes, dans différents lieux... etc... Il faut toujours tout diversifier le plus possible. Travailler sur un ordinateur les mêmes exercices que sur une feuille, c'est toujours le même objectif : cela fait acquérir à peu près les mêmes compétences... mais cela leur permet de prouver que ces compétences sont acquises dans plusieurs contextes ! Et ce n'est pas rien !

 

Revenons sur les trois manières : deux d'entre elles nécessitent des pages spéciales (cf la page Utilisation d'un imagier (sur ordinateur) et la page Le logiciel cahiécran.)

 

La première permet de travailler l'encodage grâce à un imagier téléchargeable gratuitement.

 

La deuxième est possible grâce à un logiciel gratuit téléchargeable sur le site de l'INS HEA qui s'appelle cahiécran. Ce logiciel a été conçu pour aider les élèves atteints de handicap moteur à pouvoir faire les mêmes exercices que leurs camarades de classe mais sur un ordinateur.

 

La troisième est tout simplement d'utiliser WORD qui est un logiciel tellement répandu que le fait d'apprendre à l'utiliser est déjà une compétence importante à travailler ! Voilà comment je procède :

Dans la classe, nous avons un "cahier de vie"... comme en maternelle. Il est devenu très important pour tous les élèves ! Il permet de faire un lien entre "leurs différents mondes". Il circule dans les familles chaque week-end à tour de rôle.

 

Voir  Le cahier de vie.

 

Chaque jour, je fais des photos à tous les moments de la journée. On colle ces photos dans le cahier de vie. On doit alors expliquer ce qu'on y fait...

 

Pour la plupart de mes élèves, ces explications sont produites en dictée à l'adulte... Les personnes atteintes d'autisme ont très souvent du mal à construire des phrases même simples... L'emploi des pronoms personnels est très souvent erroné (le "JE" en particulier pose de très sérieux problèmes). Ces dictées à l'adulte permettent de travailler quotidiennement la construction de la phrase et d'adapter la difficulté à chacun : certains seront capables de produire des phrases complexes ("X. écrit pendant que je compte")... Pour d'autres, l'emploi de "JE" nécessitera des mois d'apprentissage... (mais quand il vient naturellement : quel bonheur !!!)

 

L'utilisation de WORD intervient une fois ces phrases dictées et écrites par mes soins.

 

Pour les niveaux les plus simples, j'écris la phrase dictée (souvent très courte) en utilisant des fines bandes de papier sur lesquelles j'imprime des tableaux : une lettre en majuscule d'imprimerie par case.

 

Les élèves utilisent alors un outil où l'activité est décomposée en plusieurs étapes visuelles :

ordi.jpg

Cet outil est d'abord utilisé avec aide : on décompose ensemble, chaque étape est verbalisée.

Puis à force, cela devient possible en autonomie.

 

Pour les niveaux un peu plus élevés, on peut travailler les correspondance d'écriture : dans un premier temps, la phrase est écrite en majuscules d'imprimerie (mais pas dans des cases comme pour les niveaux plus bas). Je suis très maniaque et corrige chaque erreur.

 

Quand cette copie est acquise (qu'il n'y a plus de fautes du tout, même dans la ponctuation), j'écris la phrase en scripte : les élèves doivent alors reconnaître chaque lettre et la convertir pour la trouver sur le clavier. Ils doivent aussi apprendre à utiliser la touche 'majuscule'. (Dans cette étape, on trouve souvent des problèmes de confusion q/p a/e ou b/d).

 

La troisième et dernière étape est très souvent problématique pour des élèves autistes : il s'agit de passer à l'écriture cursive... Très peu de mes élèves savent écrire en lettres cursives... Le fait que toutes les lettres soient accrochées leur pose un véritable problème, mais j'en reparlerai dans un article spécifique à l'écriture.

 

Ils impriment eux-même leurs productions : cela est vraiment motivant pour eux de voir leur travail sortir de l'imprimante !!

 

Ils découpent puis collent leur phrase à côté de la photo correspondante dans le cahier de vie.

 

Cette façon de les motiver n'est pas inutile !

 

Un de mes élèves en particulier me l'a prouvé : j'ai toujours cru qu'il était incapable "physiquement" de se servir d'un clavier (il a de gros problèmes de motricité - handicap moteur associé - et jusque là, il laissait toujours les touches appuyées trop longtemps et écrivait des lignes de lettres identiques) : en fait, il ne comprenait pas l'intérêt de taper sur l'ordinateur... En passant par le cahier de vie, il a compris ce qu'il faisait, il a aussi voulu montrer qu'il en était capable : il a pu montrer ses phrases à sa famille.

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